Nous l’oublions parfois mais notre identité est un bien précieux. Chaque jour, sans nous en rendre compte, tant les gestes sont devenus habituels, nous devons témoigner de notre identité pour déverrouiller notre téléphone, payer avec notre carte bancaire, accéder aux transports en commun, travailler, bénéficier de soins médicaux, voter, etc. Cette Journée mondiale de la Femme m’offre l’occasion de rappeler qu’une identité reconnue, qui pour nous est un acquis, reste encore malheureusement un privilège dans de trop nombreux pays.
Parce que disposer d’une preuve de son identité est le premier pas vers la liberté et l’indépendance pour les femmes, je soutiens activement l’initiative Identification for Development (ID4D) menée par la Banque mondiale, visant à offrir des moyens simples et fiables de s’identifier. Parmi les chantiers gérés par cet organisme, le projet ayant pour objectif de transférer automatiquement l’argent des aides sociales sur le compte des jeunes mères pauvres, dans l’État indien du Bihar, m’interpelle à plus d’un titre. En effet, l’Inde, à travers le programme Aadhaar, qui vise à attribuer un numéro d’identité unique à chaque citoyen, fait appel depuis 2010 à l’expertise de Morpho, société du Groupe Safran, en matière de gestion de programmes d’identité. Pour les 980 millions de citoyens déjà enregistrés, il est désormais beaucoup plus simple d’ouvrir un compte bancaire et de faire valoir leurs droits.
Selon la Banque mondiale, 58 % des femmes dans le monde disposent d’un compte bancaire, alors que 65 % des hommes en ont un. Ce chiffre est en nette progression mais il reste encore du chemin à parcourir. En Éthiopie par exemple, nous avons travaillé avec Commercial Bank of Ethiopia à la création d’une carte bancaire spécifiquement destinée aux femmes. Dans ce pays, la femme joue souvent le rôle de pilier économique de la famille : c’est elle qui gère les finances. Ainsi, leur faciliter l’accès à un compte permet non seulement à ces femmes de sécuriser leurs économies, mais aussi d’accéder plus facilement à des solutions de microcrédit, et donc à l’entrepreneuriat. En disposant librement de leur identité, les femmes peuvent donc gérer plus efficacement le budget de leur famille, et ainsi envisager plus sereinement d’investir dans l’éducation de leurs enfants.
La question de l’identité ne saurait pour autant se limiter à ce volet financier. Pouvoir prouver son identité, c’est aussi être reconnu comme citoyen à part entière, c’est-à-dire faire valoir ses droits les plus fondamentaux tels que l’accès aux soins, à l’éducation ou encore pouvoir voter ou être élu. Après des années d’instabilité, plusieurs pays d’Afrique se sont engagés dans des processus de démocratisation de leur vie politique, offrant ainsi aux femmes de nouvelles tribunes d’expression. C’est le cas notamment au Mali où Morpho a contribué à l’élection présidentielle de 2013. Je suis d’autant plus fière de la participation de Morpho, que nous avons dû pour l’occasion relever un véritable défi technologique : la livraison de 8 millions de cartes d’identification électroniques en moins de 30 jours. Ces documents biométriques devraient également faciliter les futures démarches administratives des citoyens, notamment pour l’accès au système judiciaire ou pour faire valoir un héritage, un droit de propriété.
Enfin, je suis intimement convaincue que la révolution mobile dans les pays en développement va non seulement donner une plus grande liberté sociale et économique aux femmes mais également favoriser l’évolution de leur droit à l’identité. Dans ces zones, la téléphonie mobile connait un essor fulgurant, apportant l’Internet dans la majorité des foyers en seulement quelques années. Le développement de solutions d’identité numérique destinées à ces appareils, telles que le standard Mobile Connect de la GSMA, facilitera aussi bien les transactions en ligne que l’accès à des services gouvernementaux. Des technologies qui pourraient également contribuer à atteindre l’un des objectifs majeurs de la Banque mondiale : doter tous les habitants de notre planète d’une identité légale ainsi que d’un acte de naissance d’ici à 2030. Une avancée majeure au service de l’égalité homme-femme !